La courbe des taux d’intérêt sur les bons du Trésor américain s’est inversée brièvement mercredi pour la première fois depuis douze ans faisant craindre l’arrivée d’une récession aux États-Unis même si pour l’instant la première économie mondiale se porte bien.
Crainte par les investisseurs comme étant un signe historique de ralentissement économique, l’inversion de la courbe des taux, attendue depuis des mois, s’est produite mercredi matin pour la première fois depuis 2007.
Quand les taux à long terme de la dette à 10 ans passe sous celui de la dette à court terme à 2 ans, cela signifie que les investisseurs pensent qu’une récession se profile dans les 12 à 18 mois et que la Fed devra intervenir pour baisser les taux d’intérêt.
La dernière récession en 2009, qui faisait suite à l’éclatement de la bulle immobilière provoquée par la multiplication des prêts à risque (subprime), avait été précédée par une inversion de la courbe des taux. Celle de 2001, après l’explosion de la bulle internet l’avait été aussi.
Mercredi, à Wall Street l’indice Dow Jones perdait 2,30% à la mi-journée.
Plusieurs facteurs font craindre un ralentissement de l’expansion économique aux États-Unis même si pour l’instant l’économie américaine affiche encore une croissance de 2,1% en rythme annuel au 2e trimestre, bien supérieure à celle de la zone euro.
Le taux de chômage est aussi proche de son plus bas niveau en 50 ans (3,7%). Le Fonds monétaire international (FMI) a même revu à la hausse ses perspectives de croissance pour le pays. La croissance, bien que moins forte qu’en 2018, devrait atteindre 2,6% en 2019 et 2% en 2020.
Le secteur manufacturier américain en revanche montre des signes de faiblesse. Fin juin, il a enregistré un déclin de sa production pour le 2e trimestre d’affilée.
Mais c’est surtout l’impact de la morosité à l’étranger qui fait craindre une contagion sur l’activité aux États-Unis.
Outre-Atlantique, l’Allemagne, première économie européenne, a accusé mercredi un recul de son Produit intérieur brut au 2e trimestre (-0,1%) par rapport au trimestre précédent).
L’économie allemande est affectée par les incertitudes liées à la guerre commerciale menée par l’administration Trump sur plusieurs fronts, non seulement en Chine mais aussi ses attaques contre Berlin et ses exportations automobiles.
L’inquiétude suscitée par la faiblesse de la première économie d’Europe vient s’ajouter aux craintes provoquées par les péripéties de la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne et dont l’activité économique a elle aussi fini en territoire négatif (-0,2%) au 2ème trimestre.
Risques accrus
Cette semaine plusieurs économistes aux États-Unis ont averti de risques accrus d’une récession.
«Je pense qu’une récession est de plus en plus probable», a affirmé en début de semaine Mark Zandi économiste en chef pour Moody’s Analytics. «Les risques qu’une récession intervienne entre maintenant et la fin de 2020 sont un peu supérieurs à 50% si le président (Trump) met ses menaces sur les tarifs douaniers à exécution», a-t-il ajouté.
Quelques jours avant, une note d’économistes de Bank of America a alerté également sur une augmentation des risques de récession, vue désormais comme probable à 33% au lieu de 20% auparavant.
Visiblement conscient des risques que fait porter sur l’économie l’escalade des tarifs douaniers avec la Chine, l’administration Trump a soudainement ajusté son cap mardi en reportant l’instauration de nouvelles taxes.
Le président Trump a repoussé à mi-décembre l’imposition de 10% de taxes supplémentaires sur une partie de 300 milliards de dollars d’importations chinoises qu’il voulait infliger dès le 1er septembre.
Ce revirement inopiné vise à préserver le consommateur américain à l’approche des achats de fin d’année, a déclaré le président qui brigue sa réélection en 2020.
«Personne ne veut prendre le risque de perturber la saison des fêtes», alors que les dépenses de consommation sont la locomotive de la croissance américaine, a dit mercredi son ministre du Commerce Wilbur Ross.