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Start-up: de l’idée à l’action

Kévin Deniau|Édition de la mi‑janvier 2019

Start-up: de l’idée à l’action

Tout le monde peut avoir des idées d’entreprises… mais tout le monde ne devient pas pour autant entrepreneur. Les Affaires est allé à la rencontre d’entrepreneurs et d’experts qui les accompagnent pour mieux comprendre ce moment-clé du passage à l’acte entrepreneurial et l’envers du décor d’une création d’entreprise.

Le passage à l’acte entrepreneurial est fréquemment lié au fait d’avoir LA bonne idée. Un constat cependant nuancé par les experts du sujet. «Il est préférable de partir plutôt de l’intuition d’un besoin. C’est correct d’avoir une idée, mais il ne faut pas trop la couler dans le béton», affirme Claude Ananou, professeur d’entrepreneuriat à HEC Montréal et coauteur de De l’intuition au projet d’entreprise. «La pire erreur, au début, est de tomber en amour avec sa solution et non du problème que l’on veut régler», ajoute son confrère Jean-François Ouellet.

Dès lors, comment s’y prendre pour cibler un besoin ? «Le monde est truffé de problèmes à résoudre ; il suffit d’observer et de regarder ses propres frustrations ou celles de son entourage», assure Marc-Antoine Ducas. Ce sont les problèmes de congestion routière, due à des véhicules roulant essentiellement à vide, et ses répercussions sur l’environnement, qui ont d’ailleurs poussé ce père de trois enfants à créer Netlift.

«Il faut se sentir insatisfait de ce que l’on a, ne pas tolérer l’inconfort… et être prêt à dévouer de 5 à 10 ans de sa vie pour résoudre ce problème, complète Julien Smith, cofondateur de Breather. Dans mon cas, je trouvais qu’il y avait beaucoup d’espaces collectifs pour travailler à Montréal, mais peu d’espaces privés qui, pourtant, convenaient mieux à mes besoins. Cela existait ailleurs, mais pas en Amérique du Nord. Je pouvais continuer à écrire mes livres ou faire mes conférences, mes activités d’avant, mais ça me semblait être une idée trop bonne pour passer à côté. J’ai donc essayé de m’y atteler.»

Se lancer en affaires requiert donc au préalable une capacité d’éveil sur son environnement extérieur et ses possibilités. L’exemple du lancement de Connect&Go est de ce point de vue caractéristique. «À l’époque, on faisait du marketing mobile et expérientiel, raconte son cofondateur Dominic Gagnon. Un jour, une agence me demande si je sais faire un bracelet connecté qui permette d’entrer dans un stade en disant « Bienvenue Dominic ».

Je n’en avais aucune idée, mais, moi, je dis toujours oui et après je trouve les solutions. J’ai découvert sur Google une entreprise qui mettait des puces RFID dans des camions. Ensemble, nous avons réussi à faire ce mandat, puis avec son dirigeant, Anthony, nous avons ensuite créé Connect&Go.» Il faut dire que M. Gagnon n’est plus à son coup d’essai. «J’ai toujours été entrepreneur, je ne peux pas faire autre chose.» Atteint du trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), il fonde sa première entreprise à 14 ans… et la revend deux ans plus tard. «Au début, c’était pour m’occuper, car je trouvais la vie ennuyeuse où j’habitais. Je me rappelle qu’à l’école, quand on me demandait ce que je voulais faire plus tard, je répondais Bill Gates !»

Une fibre entrepreneuriale ?

Marc-Antoine Ducas s’est, lui aussi, lancé en affaires jeune, à l’origine pour gagner un peu d’argent en faisant de l’entretien paysager dans un golf. «Le mot a circulé dans le voisinage et j’ai fini par créer une entreprise à 16 ans. Je ne savais pas que cela s’appelait de l’entrepreneuriat. Ça s’est fait naturellement : il y a un besoin, des gens prêts à payer, je peux le faire… je le fais ! Et j’ai continué ensuite à toujours vouloir résoudre des problèmes, c’est devenu un tempérament.»

Aucun des deux ne vient pourtant d’une famille d’entrepreneurs. «Les personnes qui ont été encouragées à prendre des risques ou à essayer des choses tolèrent généralement mieux l’entrepreneuriat», explique M. Ouellet.

Stephanie ­Liverani, cofondatrice de ­Unsplash, a toujours eu des projets en tête. Mais elle a mis plus de temps à franchir le pas. « ­Mon travail en actuariat ne me plaisait pas trop. Je détestais les dimanches, car c’était la veille du retour au travail. Jusqu’au jour où je me suis dit : ce n’est pas la vie que je veux avoir. Le risque ne me faisait pas peur, je voulais miser sur ­moi-même. »

Particularité : l’entrepreneuse s’est associée avec son mari. « ­Je ne sais pas si je l’aurais fait sans lui. Il a fait le premier saut, m’a donné confiance et je l’ai rejoint. Aujourd’hui, je ne sais même plus quand on est dimanche. Pour moi, le premier défi, c’est de trouver quelqu’un de complémentaire avec qui tu as envie de vivre cette aventure, l’idée d’entreprise peut venir après. »

Trouver la bonne équipe fondatrice

« L’élément le plus important, c’est l’équipe fondatrice que tu vas chercher au tout début », confirme ­Frédéric ­Lalonde, cofondateur de ­Hopper. « ­Créer une entreprise, c’est juste une formalité administrative. Le véritable enjeu, c’est de réussir à mobiliser des ressources pour répondre au problème soulevé », résume M. ­Ducas.

­Théoriquement, rien n’empêche de se lancer seul. Dans la pratique, cependant, on met plus de chances de son côté en se lançant à plusieurs. ­Cela ajoute des compétences et de la confiance.

Il n’existe pas de profil type pour entreprendre, selon la recherche scientifique en la matière. « ­Au final, la différence entre les personnes qui passent à l’action et les autres, c’est la tolérance au risque, précise ­Claude ­Ananou. C’est une question, propre à chacun, de sensibilité à la perte. Pour moi, tout être humain naît entrepreneur. C’est la société qui nous bureaucratise ensuite ! »

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