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Une «start-up» qui a séduit Bell Helicopter, Bombardier et Magna

Pierre Théroux|Édition de janvier 2020

Une «start-up» qui a séduit Bell Helicopter, Bombardier et Magna

FOCUS RÉGIONAL ESTRIE. Exonetik s’est offert un beau cadeau : à quelques jours de la nouvelle année, la start-up de Sherbrooke qui était installée dans les locaux de l’incubateur-accélérateur Espace-inc depuis 2015 a déménagé dans sa propre bâtisse. Ses nouvelles installations de 14 000 pieds carrés – ayant nécessité des investissements de plus de 2 millions de dollars -, lui permettront de poursuivre un développement déjà fort bien amorcé.

«On manquait vraiment d’espace ; on louait des locaux à l’incubateur et à l’université, en plus d’un entrepôt. Ça va nous permettre de regrouper toutes nos activités en un seul endroit et de progresser plus rapidement», indique Pascal Larose, le PDG et copropriétaire.

Lancée en 2013, Exonetik est issue d’une technologie développée au département de génie mécanique de l’Université de Sherbrooke par le professeur Jean-Sébastien Plante, devenu cofondateur et chef de la technologie de l’entreprise. Des travaux de recherche dirigés par le Consortium de recherche et d’innovation en aérospatiale au Québec (CRIAQ) et menés conjointement avec l’Université Laval et des acteurs de l’industrie – Bell Helicopter et Bombardier – ont ensuite conduit à son essaimage.

Nouveaux actionneurs

Exonetik conçoit des actionneurs à fluide magnétorhéologique, des dispositifs qui permettent d’effectuer une action mécanique à partir d’une source électrique. Ceux-ci sont destinés à améliorer l’interaction entre des systèmes mécaniques et leurs utilisateurs, et ainsi les rendre plus performants.

En aéronautique, par exemple, les actionneurs développés par Exonetik permettent au pilote d’hélicoptère ou d’avion de mieux sentir les sensations de pilotage quand il en actionne le manche à balai. «Nos actionneurs permettent l’ajout d’une rétroaction tactile aux contrôles des appareils, grâce à l’envoi de signaux en temps réel qui transmettent au pilote les conditions de vol externes», explique M. Larose. Cette technologie, ajoute-t-il, procure au pilote une meilleure perception des limites recommandées de l’appareil, ce qui n’est pas possible sur des équipements standards. Elle a aussi l’avantage de diminuer grandement le nombre d’entretiens requis sur un engin, car moins de pilotes devraient en excéder les limites.

Les travaux de R-D menés conjointement avec Exonetik ont entre autres permis l’émergence de prototypes technologiques destinés à Bell Helicopter. «Les résultats sont très positifs. Les nouveaux actionneurs laissent entrevoir une optimisation de la performance et une réduction du poids et du coût de nos systèmes de vol électrique», se réjouit Michel Dion, directeur Innovation chez Bell Helicopter Canada, qui qualifie même cette percée technologique d’ «innovation de rupture».

M. Dion s’attend à ce que l’entreprise basée à Mirabel puisse implanter ces nouveaux actionneurs d’ici la fin des années 2020. «Il y a encore des travaux de développement à faire, et les processus de certification sont toujours très longs dans le secteur de l’aéronautique», précise-t-il. L’enthousiasme envers la technologie et les produits d’Exonetik est tel que des dirigeants américains de la maison-mère de Bell Helicopter se sont déplacés au Québec afin d’en constater les résultats.

Partenariat industriel c. capital de risque

Les actionneurs d’Exonetik favorisent aussi le déploiement de nouvelles applications dans le secteur des transports terrestres, en robotique et en biomécanique. Son équipe travaille d’ailleurs avec le fabricant canadien de pièces automobiles Magna International pour intégrer ses actionneurs dans la fabrication de sièges pour camions, qui permettraient une meilleure absorption des chocs. Il s’agira du premier produit commercialisé par la start-up sherbrookoise, qui devrait en faire la vente à grande échelle à partir de 2021. «Le temps de développement pour amener un produit sur le marché dans le secteur des véhicules est beaucoup moins long» que dans le secteur de l’aéronautique commerciale, souligne M. Larose, qui s’attend à percer ce dernier en 2023.

Pour l’instant, Exonetik vend des prototypes à ses partenaires des secteurs de l’automobile et de l’aéronautique. Au lieu d’avoir recours à des capitaux de risque, elle a choisi la voie du partenariat pour industrialiser le produit et financer son développement.

«Avec des investisseurs, il aurait fallu choisir et se concentrer sur le développement d’une seule application de notre technologie, explique son PDG. Mais on croyait qu’elle avait un potentiel plus grand et qu’elle pouvait être utilisée dans plusieurs secteurs d’activité, sans savoir toutefois lequel émergerait en premier. Ça nous donne plus de liberté dans notre plan de croissance.»

L’entreprise emploie aujourd’hui 25 personnes, dont une majorité est titulaire d’une maîtrise ou d’un doctorat. Elle a enregistré des ventes de 3 M$ en 2019, en hausse de 1 M$ par rapport à l’année précédente, dont plus de 50 % provenant des États-Unis, de la France et de l’Allemagne.

Bras robotique dans l’espace

La PME sherbrookoise a aussi reçu une aide financière de plus de 200 000 $ de l’Agence spatiale canadienne pour développer des bras robotisés à l’intention des astronautes. Les robots sont utilisés lors de missions spatiales pour aider les astronautes à accomplir des tâches difficiles, et ce projet vise à mettre au point des bras robotisés semblables à ceux utilisés dans les secteurs de l’automobile afin de construire des robots plus légers et plus performants.

Exonetik travaille également à l’intégration de ses actionneurs dans des robots collaboratifs, dans le but de les rendre plus efficaces et plus sécuritaires pour les travailleurs du secteur manufacturier.