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Quand la vengeance se mêle au harcèlement

fdemers|12 juin 2024

Quand la vengeance se mêle au harcèlement

Si la victime reste sans aide, malheureusement, les effets continueront à se faire sentir sur elle et sur l’entreprise. (Photo: 123RF)

EXPERTE INVITÉE. L’arrivée des nouvelles mesures de la Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail, amène son lot de questionnements. Les entreprises ont d’ailleurs plusieurs interrogations par rapport à la gestion des différents cas dans leur organisation.

Il fallait peut-être s’y attendre, de plus en plus d’organisations gèrent des situations de vengeance lorsqu’une plainte du harcèlement est déposée ou qu’une personne ose partager une situation que nous pouvons qualifier de malsaine. Et de ce fait, la situation peut perdurer.

Par exemple, une personne dépose une plainte de harcèlement psychologique envers une autre et quelques jours plus tard, le présumé harceleur dépose à son tour une plainte de harcèlement contre cette présumée victime.

Une employée dénonce à son superviseur les mauvais comportements d’un ou une collègue, et voilà que ce dernier fait de la diffamation et influence plusieurs autres personnes à juger cette employée et la faire passer pour une menteuse. Nous pouvons qualifier ce type de comportement de « diviser pour mieux régner ». Car c’est en effet ce qui arrive, une division dans l’équipe. 

D’autres tenteront d’utiliser toutes sortes de stratégies pour atteindre l’individu qui ose parler de ce qu’elle vit à son employeur. Le présumé harceleur le fera dans une intention de lui faire vivre des émotions désagréables qui finiront par l’affaiblir. Par exemple, en refusant de répondre à ses demandes ou en lui jetant des regards noirs. 

De plus en plus d’entreprises m’ont nommé ce type de situation dans leur organisation.

Cette nouvelle réalité ajoute bien des casse-têtes aux gestionnaires, qui se trouvent à gérer les opérations quotidiennes en plus des conflits qui perdurent et prennent de l’ampleur dans leurs équipes.

Il existe certains profils d’individus qui, malheureusement, useront de ces stratégies de représailles pour continuer leur emprise sur l’autre et qui souhaitent avoir raison à tout prix. Comme si le désir de gagner et de contrôler prenait toute la place.

Certains riposteront face à la victime et, lors des enquêtes ,mentionneront qu’ils l’apprécient. Cette incohérence de comportements vient brouiller l’analyse lors des enquêtes du harcèlement et avec raison.

Il est important, voire essentiel, que les organisations et les individus qui la composent, réalisent que ce type de posture, cette réponse punitive de la part de ces gens, sont en quelque sorte une continuité de la violence déjà entamée du harceleur.

Le désir de dominer est si grand, qu’il s’active davantage lorsque la victime tente de s’échapper des mailles de cette emprise installée.

Le même phénomène se produit lorsqu’une femme tente de quitter une relation empreinte de violence conjugale — sous toutes ses formes. Évidemment, dans un contexte différent.

Cela cache habituellement une grande détresse psychologique chez les gens qui useront de cette vengeance.

Ignorer cette réalité entraînera un désordre important à gérer. Qui dit vrai?

De plus en plus, les leaders seront appelés à reconnaître les répercussions chez une victime afin de les aider à démêler le vrai du faux.

Il est plutôt rare qu’une victime use de ce type de réflexe.

Au contraire, plusieurs se replieront sur elles-mêmes, auront des signes d’anxiété, d’angoisse et attendront avant d’en parler. Puisque souvent, elle ignore le cycle de violence dans lequel elle se trouve.

Généralement, lorsqu’elle arrive à cette étape, de nommer ce qu’elle subit, le stress est devenu si grand, que les émotions désagréables prennent souvent le dessus durant les conversations avec les autres. Il devient alors plus difficile pour le gestionnaire ou la personne qui enquête de l’entendre.

Mieux comprendre quel type de personne se cache derrière les harceleurs, comment les reconnaître, leurs stratégies de manipulations, sont des connaissances essentielles à avoir en tant que gestionnaire.

De même, ce type d’informations est pertinent à partager à l’ensemble de l’entreprise.

Plus les gens seront avisés, plus cela facilitera les approches dans les choix d’interventions et surtout de repérer les vraies victimes.

Nous savons que la Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail sert à aider les victimes qui subissent un environnement toxique qui les entraîne fréquemment dans une santé mentale fragilisée et parfois même un choc post-traumatique.

En tant qu’employeur, nous désirons que ces mesures les aident à dénoncer et aussi à les aider à sortir de ce statut de victime.

 

Comment faire pour y arriver?

Une des manières pour y parvenir est de reconnaître quels mécanismes utilisent les personnalités manipulatrices, savoir comment communiquer et les gérer. Nous sommes certainement arrivés à un temps où nous aurons à parfaire nos connaissances sur les répercussions que peuvent générer ces individus tant sur les autres que sur leur environnement.

Pour la victime, il faut lui offrir une écoute et la référer à des ressources extérieures pour lui venir en aide. Une personne qualifiée, par exemple un ou une thérapeute, saura comment l’accompagner dans ce processus.

Si elle reste sans aide, malheureusement, les effets continueront à se faire sentir sur elle et sur l’entreprise. Les conséquences risqueront d’augmenter avec le temps.

Cela demande une grande habileté du gestionnaire, lorsqu’il a à gérer ces types de situations où l’un punit l’autre.