Logo - Les Affaires
Logo - Les Affaires

Pas de choc tarifaire pour les entreprises, dit Fitzgibbon

Dominique Talbot|Mis à jour le 27 juin 2024

Pas de choc tarifaire pour les entreprises, dit Fitzgibbon

«C’est certain que l’on peut présumer que le coût de service va augmenter dans le futur. Par contre, l’augmentation va être en fonction des nouveaux ouvrages: éoliens, solaires, returbinage, par exemple. On parle d’années avant que ce soit en place», explique le ministre Pierre Fitzgibbon. (Photo: Simon Prelle)

Alors que le ministre Pierre Fitzgibbon assure que les tarifs résidentiels n’augmenteront pas de plus de 3%, les organisations économiques qui représentent les PME de la province s’inquiètent de subir un choc tarifaire.

En entrevue avec Les Affaires, le ministre de l’Économie, de l’Énergie et de l’Innovation et le ministre responsable du Développement économique régional a tenté de se faire rassurant.

Sans vouloir s’avancer sur un pourcentage d’augmentation qui représente ou non un choc tarifaire pour les PME, il avance qu’«il est faux de dire qu’il y aura un impact pour les industries». Advenant une hausse des tarifs résidentiels supérieure à 3%, cette dernière sera compensée par des crédits versés à Hydro-Québec.

 

Lire aussi – Projet de loi 69 sur l’énergie: qu’adviendra-t-il de votre lave-vaisselle?

«C’est certain que l’on peut présumer que le coût de service va augmenter dans le futur. Par contre, l’augmentation va être en fonction des nouveaux ouvrages: éoliens, solaires, returbinage, par exemple. On parle d’années avant que ce soit en place», explique le ministre Fitzgibbon.

«Deuxièmement, poursuit-il, il ne faut pas oublier qu’il y a le bloc patrimonial de 165 TWh. Il y a peu près 30 TWh construits depuis. Donc près de 200 de base. Si on ajoute 10, 20, 30 TWh, ce sera marginal dans le coût moyen de production. Il n’y aura donc pas de choc tarifaire à moins que l’inflation monte à 10%. Je pense qu’il va y avoir une corrélation entre l’inflation et le coût de service. [Par contre] quand on va rentrer les nouveaux ouvrages, la pondération va changer», prévient-il.

La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante estime que les PME paient leurs tarifs d’électricité en moyenne de 18 % à 28 % plus cher que les coûts réellement encourus pour les desservir. Son président, François Vincent, rappelle d’ailleurs que les PME ont subi des hausses de tarifs de 6,4% en 2023 et de 5,1% en 2024.

Bien qu’il accueille favorablement le projet de loi 69, le président et chef de la direction du Conseil du patronat, Karl Blackburn, se dit inquiet pour les PME. Pour lui, «le gel de l’augmentation des tarifs résidentiels aura des conséquences directes pour les entreprises. Dans un contexte où leurs coûts sont élevés, ce n’est pas une bonne nouvelle. Le coût du tarif résidentiel ne représente pas le coût réel de la production et du transport de l’électricité».

Ce dernier se réjouit toutefois que le projet de loi intégrera «des mécanismes plus clairs et transparents ainsi que des raccourcis». À long terme, dit-il, avec le Plan intégré de gestion des ressources énergétiques, le projet de loi «réglera le problème de la prévisibilité entre la capacité énergétique disponible et les besoins des entreprises.»

 

Lire aussi – Production privée d’électricité: les industriels sont soulagés

 

Plus de pouvoirs à Hydro-Québec… Et à la Régie de l’énergie

Il y a déjà un bon moment qu’Hydro-Québec demandait au gouvernement des moyens d’accélérer l’élaboration et la réalisation de projets énergétiques. C’est maintenant chose faite alors que la société d’État pourra aller de l’avant sans passer par un processus d’appel d’offres.

Cependant, pour contrebalancer ces «raccourcis», la Régie de l’énergie revient en force dans le paysage, son champ d’action ayant passablement diminué depuis l’adoption de la loi 34 en 2019. C’est elle qui devra dorénavant surveiller Hydro-Québec.

Pierre Fitzgibbon ne voit pas de contradictions entre les nouveaux pouvoirs octroyés à la fois à Hydro-Québec et à la Régie.

«Nous allons permettre à Hydro-Québec pour la flexibilité, de ne plus faire d’appel d’offres. C’est un gros changement. Présentement, ça prend 100 semaines. Par contre, tous les contrats devront être examinés en détail par la Régie. C’est un contrepoids. On ne peut pas laisser Hydro-Québec tout faire seul.»

Il insiste: «on rehausse la capacité, le rôle de la Régie et en même temps, on raccourcit le temps. D’autre part, la tarification sera établie par rapport au coût de service, que la Régie va devoir examiner. Donc Hydro-Québec, Énergir, vont soumettre leurs coûts. La Régie fera une revue pour établir si les coûts sont admissibles. On lui donne plus de pouvoir», insiste le ministre.

Cela dit, la Régie pourrait bien se retrouver dans une situation inconfortable. Elle s’inscrit à la fois dans un contexte où la réalisation de projets énergétiques doit s’accélérer, mais avec le pouvoir de s’interposer dans des contrats qu’Hydro-Québec conclura de gré à gré. Un fragile équilibre où les deux entités auront intérêt à bien faire leurs devoirs pour réaliser les objectifs énergétiques du gouvernement.

«Fallait que je trouve l’équilibre. Il faut accepter qu’Hydro-Québec est un monopole. Un monopole, plus on est gros, ce n’est pas nécessairement un signe d’efficacité, exprime Pierre Fitzgibbon. Pour moi c’était important d’avoir un contrepoids à ce monopole. Quelqu’un va devoir vérifier que le coût ultime est le bon coût. Le gré à gré doit se faire dans un contexte qui est économiquement raisonnable.»

«Hydro-Québec connaît les règles et ils sont d’accord avec ça, poursuit le ministre. C’est le compromis que nous avons fait. Je ne voulais pas qu’Hydro-Québec puisse faire un gré à gré sans avoir à rendre des comptes sur le coût du service.»

 

Avec la collaboration de François Normand et Katia Tobar

 

Consultez notre dossier spécial sur la filière batterie